Le dictionnaire corporate (3)
Tu n’as jamais dépassé le 12.5 de moyenne en anglais durant toute ta scolarité ? La novlangue corporate est là pour toi. En plus de styliser ton propos, elle te permettra d’utiliser des expressions qui feront croire à tes interlocuteurs que ta mère est professeur d’anglais. Du bluff pur et simple. Mais attention, l’important ce n’est pas les cartes, mais ce que vous en faites.
Monter en compétences : Chez toi, le dimanche, tu montes des armoires suédoises. Ou des suédoises sur l’armoire. En entreprise, tu montes en compétences. En clair, les missions qui te sont attribuées te permettent, d’une part de gagner quelques talents supplémentaires dans ta panoplie de col blanc (un peu) et, d’autre part, de remplir avantageusement les lignes de ton cv (beaucoup). Attention, monter en compétences est indispensable pour augmenter ta part variable à la fin de l’année. A ne pas négliger, donc.
Bilatérale : Expression bien connue des amateurs de gymnastique de reproduction sur sofa (GRS), la bilatérale n’est en fait qu’un simple synonyme de réunion. Seulement, ces réunions ne te concernent pas : elles désignent les rendez-vous réguliers entre le n, et la flopée de suppos gratte-papier lui servant de n-1. Pour prendre une image scientifique, la bilatérale représente le haut de la pyramide de l’entreprise. En fait, c’est un peu comme le barycentre, t’en as beaucoup entendu parler, mais tu sais toujours pas à quoi cela sert. Précaution d’usage, suite à une « bilat » qui tourne au vinaigre pour votre chef, vous risquez de vous en prendre une, en bilatérale également.
Lancer une consultation : Formule médicale tarifée généralement plus de 22 euros, la consultation vise à faire appel à un service externe afin d’effectuer une mission que l’entreprise est incapable de réaliser en interne. En clair, la consultation vise à remédier aux carences cérébrales d’un ou plusieurs collaborateurs qui, selon leur hiérarchie, feraient mieux de monter en compétences au lieu de palabrer à la machine à café sur l’avenir de la mode newyorkaise du nudisme hôtelier. La consultation s’accompagne parfois d’un oral pour tester la compétence des candidats. Un service tarifé qu’on vous dit.
Le cahier des charges (rédiger un) : L’expression qui porte bien son nom. Aussi lourd et obscur que le programme du parti socialiste, le cahier des charges définit les attentes de l’entreprise envers son futur prestataire. Il s’articule généralement autour du COPAC (teaser habile, cf ci-dessous) que tu utilises Powerpoint après Powerpoint. Se rédigeant en amont de la consultation, il est important de prendre soin de son cahier des charges : c’est un peu comme ton cahier de santé, ça te sert surtout à te vacciner contre les emmerdes. Se précède à l’usage par une préposition d’emmerdement, comme dans : « du coup, tu me rédiges le CDC » qu’il faut contrer par la métaphore d’évitement « a non merde, je suis déjà sous l’eau là ».
Benchmark : Terme issu du mouvement monétarisme allemand du 17ème siècle, que l’on emploie plus communément sous le bréviaire de « bench ». Aussi, le bench est une étude soi-disant comparative qui vise en réalité à filouter des bonnes pratiques à la concurrence. En fait, le bench, c’est un CTRL-C/CTRL-V de la stratégie du voisin. Du simple plagiat sans ton coude et ton livre entre la table pour empêcher ton voisin de copier. Attention, le benchmark n’a rien de répréhensible, c’est une pratique de place couramment admise. Particularité cependant, la bench est un travail exclusivement réservé aux stagiaires. Selon l’APEC, 96% des CV des jeunes diplômés en font référence. « A oui, tiens, du coup, pour le bench…«
Le « Copil » : Contraction à la mode dans le domaine du rallye automobile qui désigne le comité de pilotage d’un projet. A ne pas confondre avec le CODIR qui désigne généralement une assemblée de cinquantenaires dégarnis du bulbe à voitures de fonction, chauffeurs et stocks en options. Heureux hasard néanmoins, le Copil est un anagramme de picole et ça, c’est quand même bien drôle.
La place : Terme emprunté au CAC 40 et aux grands hommes pour désigner les grosses boîtes concurrentes. Aussi, peut-on, via un « bench », aller voir « ce qui se fait sur la place » et en déduire « des pratiques de place ». Employé avec tact en CODIR ou COPIL, il saura donner du poids à votre argumentaire auprès de votre hiérarchie. En découlera une démonstration solide du style « euh, c’est bon les gars, on peut y aller les autres le font aussi, on va pas se faire choper la maîtresse ». Attention, ne demandez pas « d’aller voir ce qui se fait sur la place » à un jeune un bleu-bite fraichement arrivé dans votre service. Il risquerait de le prendre au pied de la lettre ou de vous adresser un oui poli, tout en se demandant où se trouve cette satanée place que vous ne cessez d’évoquer.
Compliance : De nature sociale ou réglementaire, la « compliance » est un anglicisme courant dans le langage du consultant de base. En fait, son emploi relève d’une vanité de bon aloi, soit d’un bon coup au bulshit bingo car son équivalent français de « conformité », s’il ne fait rêver personne, veut dire exactement la même chose. En clair, la compliance est un bien triste exemple de la lente mort de la langue française en entreprise : c’est un « lol » adressé à cette dernière.
Matricielle : Se dit d’un raisonnement ou d’une démonstration qui combine plusieurs dimensions au sein d’un graphique avec abscisse, mais toujours ordonné. Associant le plus souvent le niveau de risque sur une échelle de temps, la matrice permet d’en mettre plein la vue dans les présentations powerpoint. Elle peut également donner lieu à des tableaux croisés dynamiques, qui te feront amèrement regretter de ne pas avoir choisi une carrière d’agent de la DDE et de pas avoir pris la pilule bleu.
Reporting : Cousin du benchmark. Découlant d’une démarche « top-down », le reporting est avant tout un anglicisme pour faire classe. Car en vrai, collecter des données dans d’interminables lignes Excel pour les faire » remonter », cela n’a rien d’attrayant. Typiquement le genre de tâche poussant à embaucher un stagiaire, ou à se les sortir pour ne pas être stagiaire trop longtemps.
Brainstorming : Réunion d’inspiration néolibérale faisant le pari que la somme des intelligences individuelles participe à l’intelligence collective. Exaltant au début, le brainstorming devient rapidement ennuyeux, voir frustrant. Devant les inepties déblatérées par vos collègues, il vous arrivera parfois de manger votre table de dépit et ce pour éviter de la lancer avec rage. L’apparition d’insultes dans les débats marquera la fin de la phase brainstorm de la réunion, pour laisser place à celle,non moins créative de « savate et outrages » .
Le « COPAC » : Le carré magique du powerpoint. Le « thèse-antithèse-synthèse » connu de tous les amateurs de Smarts Art et de Bullet Point. C pour contexte, O pour objectifs, PA pour plan d’actions et C pour calendrier. Le COPAC est ancré dans la culture corporate, elle est une tradition non écrite qui se transmet de cravates en cravates. C’est d’ailleurs au bon usage du COPAC que l’on reconnait le vieux loup de mer de l’entreprise : il lui permet à la fois de ne pas trop travailler (le COPAC c’est comme le vélo, on ne l’oublie pas une fois appris) tout en lui garantissant clarté et respect auprès de sa hiérarchie. Le COPAC, c’est l’ISO 9000 de la présentation PowerPoint, si tu ne l’as pas, tout de suite, t’es moins crédible. C’est donc la clé d’entrée du monde de l’APEC, à rajouter d’urgence dans la rubrique compétences de ton CV (cela t’évitera de faire des études à rallonge, de perdre un foi tout en gagnant 5 ans de cotisation retraite).
Bulshit bingo : Jeu très en vogue chez le consultant et le chargé de mission qui s’en servent pour égayer leurs journées passées au bureau devant Microsoft Office 2003 et Google Actu. Consistant à placer des mots « corporate» en réunion ou en présentation, il contribue au développement de la novlangue franglaise de bureau dont vous devez désormais connaître les bases…
Les 10 raisons pour lesquelles Federer ne doit pas gagner Roland-Garros
Dans le monde du tennis, ne pas supporter Federer, c’est un peu comme se balader nu dans une suite du Sofitel : c’est très mal vu. Et pourtant les raisons de détester cet helvète à Rolex ne manquent pas. Petit panorama.
1. La prononciation fallacieuse de son prénom. Malgré des us orthophoniques douteux, il faut rappeler que Federer s’appelle bel et bien Roger, comme Roger du bistrot et non « Rodgeur », comme semble le penser tous les tennix du coin. Vous avez déjà entendu parler de Rodgeur Hanin ou Rodgeur Salengro ? Moi non, donc acte.
2. J’en ai marre de voir Mirka à chaque changement de côté. Ce mix entre Magalie Vaé et Valérie Damidot m’irrite les yeux depuis 10 ans, faudrait quand même penser à en changer ou à lui présenter le Docteur Ducan. Assurément, la preuve d’un manque d’ambition ou d’un mental friable au moment de scorer.
3. Pour venger son coiffeur. Au chômage technique depuis 2002, date à laquelle Roger a décidé d’adopter sa coupe de G-Squad, qu’il compte apparemment garder jusqu’à sa mort.
4. Il a lancé la mode des mèches. Si aujourd’hui de trop nombreux collégiens/lycéens exhibent fièrement leurs mèches en sortie de bahut, c’est aussi à cause de Federer et de sa coupe, dont on ne dira jamais assez combien elle a pu influencer les jeunes populaires français. Merde, chéri, t’aurais pas vu mon polo bleu ciel ?
5. Son revers à une main est une horreur. En fait, les mecs qui font un revers à une main, c’est juste des types trop faibles pour faire un revers à deux mains. C’est un peu le revers des tennix qui jouent à la Wii ou au ping-pong. Faiblesse donc. Alors c’est sûr, en note artistique, il peut viser le « 5.9″, mais jusqu’à nouvel ordre, le tennis, ce n’est pas de la GRS. Bartoli l’a d’ailleurs bien compris.
6. Ana Wintour est une amie. En plus d’une chorégraphe pour son revers, Roger s’est adjoint des services de la papesse de la mode. Faudra pas s’étonner s’il se la ramène en marinière à Wimbledon. Et oui, les peignes-cul ont aussi le droit d’être au top des tendances. Dans deux ans dans ton open-space…
7. Il n’est pas français. Il essaye bien de tromper son monde avec ses casquettes « RF, aka République Francaise » et ses interviews en français LV2, mais non, Roger n’est pas français. Alors stoppons tout de suite ce favoritisme francophone totalement abscons. Parce que tu l’encourages autant, Stanislas Wawrinka ?
8. Il a le même jeu que Pete Sampras. Et Dieu sait qu’on se faisait chier à l’époque. Question charisme, c’est pareil. Federer a le charisme de Wawrinka (comique de répétition). Qu’on nous rendre Thomas Muster, le boucher autrichien ou Goran Ivanisevic, le boucher des Balkans, par pitié. Et je ne parle pas de ses interviews d’après match, digne de Jean-Francois Copé pour la langue de bois et de Ségolène Royal pour les sentiments dégoulinants. C’est limite s’il nous sort pas qu’il est content d’avoir pris les trois points et qu’il allait prendre les matchs les uns après et les autres. Et que la guerre c’est mal.
9. Pour glisser une quenelle à Arnaud Boetch et Lionel Kamoulox. Comme à chaque fois, le duo de mange-boule tennix passe la quinzaine à commenter avec la partialité d’un procureur chinois. Pour Arnaud Boestch, cela peut se comprendre : les apéros passés avec Roger en Suisse sur le compte du contribuable français ont logiquement altéré son sens critique. Quant à Chamoulox, il s’est assis depuis longtemps sur sa carte de presse, comme sur son devoir de réserve, pour adopter la position d’animateur, à raie bien coiffée, pour la ménagère de moins de 50 ans. Alors Rafa, si tu pouvais leur caler la barquette, comme chaque année, on pourra se délecter devant leur mine déconfite dimanche soir…
10. C’est un peigne-cul. T’as pas lu les 9 premières raisons ?
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